Le pire est finalement arrivé. Le journaliste Martinez Zogo a été retrouvé mort dimanche dans une banlieue de Yaoundé, plusieurs jours après son enlèvement. Ce nouveau meurtre d’homme de médias, illustre à suffisance, les défis importants qui restent à relever au Cameroun en terme de liberté d’expression.
Célèbre dans son pays pour son travail d’investigation et ses révélations parfois troublantes, Martinez Zogo n’aura plus la possibilité de poursuivre son combat.
La seule solution que les détracteurs ont trouvé pour faire taire ce journaliste devenu encombrant, c’est de mettre fin à sa vie.
Dans un pays où les challenges en terme de sécurité, de développement, ou encore d’emploi restent à relever, le journaliste se présentait comme la voix des sans voix, l’éclaireur.
Pour aider à mettre la mettre la lumière sur les mauvaises pratiques qui retardent son pays, Zogo n’hésitait pas à citer des noms, dévoiler des chiffres. Une méthode qui ne plaît pas.
La répression, une pratique en vogue
Marinez Zogo, cette voix dérangeante pour certains, mais indispensable pour la moralisation de la société, a été éteinte pour de bon. C’est une mode utilisée depuis belles lurettes dans le monde.
C’est clairement un «assassinat odieux» comme l’indique le Syndicat national des journalistes du Cameroun dans un communiqué.
Les membres de ce regroupement, qui défend les intérêts de la corporation, craignent que les conséquences de cet acte ignoble restreignent davantage « la liberté et la sécurité au Cameroun ». Et c’est à juste titre, au vu de la tournure des choses.
En deux ans, le Cameroun s’est illustré dans le carnet sombre des meurtres d’hommes de Médias. En 2020, le journaliste Samuel Wazizi est mort en détention après avoir été accusé de “terrorisme” par les autorités.
Selon un dernier rapport (2022) de Reporters Sans Frontières, « le Cameroun n’en est pas moins l’un des pays les plus dangereux d’Afrique pour les journalistes. Les professionnels de l’information y évoluent dans un environnement hostile et précaire. »
L’assassinat de Zogo vient valider les affirmations de cette ONG qui dressera sans nul doute en cette année 2023 un nouveau tableau sombre avec le Cameroun parmi les mauvais élèves.

Le 9 mars 2022, le reporter de Cameroun Web, Paul Chouta, avait été enlevé par plusieurs hommes non identifiés dans une voiture. Il fut ensuite violemment agressé avant d’être laissé pour mort au bord de la route.
Deux questions se posent
Au lendemain de ce nouvel assassinat de journaliste, le monde de la presse au Cameroun se pose deux questions :
- Faut-il continuer à bien faire son travail au risque de sa vie ?
- Ou alors, doit-on désormais se résoudre à ne plus évoquer certains sujets, certains écarts ?
En 2021, les deux journalistes Paul Chouta et Emmanuel Mbombog Mbog Matip sont sortis de prison après avoir passé respectivement 24 et 16 mois derrière les barreaux à la suite d’accusations de diffamation.
Enquêtes sans suite
Comme à l’accoutumée, après l’annonce du meurtre de Martinez Zogo, les autorités ont annoncé l’ouverture d’une enquête. Mais cette enquête de plus aura-t-elle une chance de réussir ?
Une question légitime, car plusieurs procédures similaires n’ont pas eu aucune suite. Ce qui donne visiblement des ails aux bourreaux de la presse camerounaise.
Les meurtres se poursuivent, et aucun mécanisme ne réussit à dissuader les détracteurs. Le cas du Cameroun illustre également les chalenges dans plusieurs autres pays d’Afrique.
Au Burkina Faso par exemple, les autorités de la transition, ont dû hausser le ton dans une déclaration face aux sorties hasardeuses et haineuses d’individus, et même de politiciens, contre des hommes de presse.
La presse, qui portait bien son statut de 4e pouvoir, se cherche actuellement au Cameroun. Des jours meilleurs ne sont possibles que si la répression s’arrête et des solutions idoines sont trouvées aux menaces inacceptables contre les journalistes.
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